Le président national de Teamsters Canada, François Laporte, a écrit au premier ministre Trudeau au sujet du besoin urgent de mieux protéger les travailleurs du secteur des transports du COVID-19. La lettre se trouve ci-dessous. Nous continuons à mettre de la pression sur les entreprises et les gouvernements concernant plusieurs enjeux qui rendent le travail de certains de nos membres dans le secteur des transports difficile.

Monsieur le premier ministre, 

Les travailleurs des transports sont l’épine dorsale de notre économie et sont essentiels à la livraison de nourriture et de fournitures médicales à travers le pays. C’est un travail devenu encore plus crucial par la crise actuelle; vous avez même remercié « les livreurs, (…) les chauffeurs de camion, les conducteurs de train et tant d’autres » lors de votre conférence de presse dimanche dernier.

En tant que président national de Teamsters Canada, le plus grand syndicat du secteur des transports, je vous écris pour presser votre gouvernement à promulguer et à appliquer des règlements plus rigoureux afin de protéger les travailleurs des transports.

En d’autres mots, si nous ne parvenons pas à protéger les travailleurs des transports, la chaîne d’approvisionnement de notre pays s’effondrera et nous ne pourrons plus livrer les produits essentiels aux Canadiens. Ce serait une catastrophe.

Nous avons identifié six domaines spécifiques qui nécessitent une attention urgente d’Ottawa. Prendre des mesures immédiates contribuera grandement à assurer l’intégrité de notre chaîne d’approvisionnement tout au long de la pandémie.

Heures de service des camionneurs

Certains employeurs poussent les chauffeurs de camion à travailler de plus en plus d’heures pour répondre à la demande qui monte en flèche en raison des achats générés par la panique des consommateurs. Certains poussent même les conducteurs à travailler au-delà du maximum hebdomadaire fédéral de 70 heures.

Pire encore, nous avons appris que des groupes de l’industrie du camionnage ont commencé à faire pression sur Ottawa pour obtenir des exemptions à la règlementation sur les heures de services, ouvrant ainsi la voie à des conducteurs dangereusement fatigués sur nos routes. En plus des problèmes évidents de sécurité routière, la science nous dit qu’être en état de fatigue affaiblit le système immunitaire et rend les gens plus vulnérables aux infections virales.

Soyez assurés que la demande accrue des services de transport résultant de la panique des consommateurs sera éventuellement compensée par la baisse de la demande des autres secteurs de l’économie touchés.

Nous demandons à Ottawa de rejeter les demandes d’exemption des heures de camionnage et d’intensifier l’application des règlements existants.

Assurance voyage pour les travailleurs des transports

Certains employeurs n’offrent pas d’assurance voyage adéquate aux camionneurs. Dans l’éventualité ou des camionneurs ou des cheminots contractent le virus aux États-Unis, ils pourraient être tenus de payer plus de 35 000 $ US pour des traitements. Ce serait profondément immoral.

De plus, une assurance voyage adéquate pour les travailleurs de transports pourrait accélérer la propagation du virus, car les travailleurs malades retourneraient au Canada pour se faire soigner au lieu de le faire aux États-Unis.

Nous demandons à Ottawa de forcer les compagnies de camionnage et de transport ferroviaire de s’assurer que les camionneurs n’auront pas à payer de leurs poches en cas de maladie aux États-Unis.

Des conditions de travail hygiéniques

La propreté des camions, des trains et des véhicules de livraison est un problème constant et la situation n’a fait qu’empirer depuis le début de la pandémie. Les camions, les trains et les véhicules de livraison sont généralement utilisés par plusieurs travailleurs et les véhicules ne sont pas nettoyés entre chaque utilisation. Certains véhicules sont rarement nettoyés. Cela augmente la possibilité de transmission par contact avec le volant, le levier de vitesse ou d’autres surfaces à contact élevé.

Les conducteurs de camions en particulier doivent faire face à des aires de repos qui n’ont pas été nettoyées adéquatement. Certaines aires de repos ont tout simplement commencé à fermer, empêchant les conducteurs d’avoir accès à un repas chaud, à des douches chaudes ou même à un endroit où se laver les mains.

Nous demandons à Ottawa de forcer les entreprises de camionnage à nettoyer les camions, les trains et les véhicules de livraison entre chaque utilisation. Nous demandons également à Ottawa de prendre toutes les mesures nécessaires pour s’assurer que les aires de repos restent ouvertes et nettoyées adéquatement.

Équipement de protection individuelle

En raison d’une pénurie, la plupart des employeurs ne sont pas en mesure de fournir aux travailleurs des transports de l’équipement de protection individuelle tel un désinfectant pour les mains et des lingettes désinfectantes. Il est donc très difficile pour les travailleurs de suivre les conseils d’hygiène et de prévention.

Les camionneurs et les cheminots qui traversent les frontières internationales pourraient être porteurs du virus et l’amener d’un bout à l’autre du continent, en particulier lorsque les véhicules ne sont pas correctement nettoyés. Les courriers et les livreurs effectuent des centaines d’arrêts par jour et risquent de propager ou de contracter la maladie à tout moment durant leur journée de travail. Les chauffeurs d’autobus sont également en contact avec des dizaines, voire des centaines de personnes chaque jour.

Nous demandons à Ottawa de fournir des équipements de protection individuelle directement aux travailleurs.

Autobus interurbains et interprovinciaux

Les déplacements interurbains et interprovinciaux en autobus ont ralenti, mais ne se sont pas complètement arrêtés. Les chauffeurs d’autobus sont confinés dans leur véhicule avec des dizaines de passagers alors que certains pourraient être porteurs du virus.

Certaines villes ont commencé à autoriser les passagers à embarquer par la porte arrière. Nous saluons cette pratique, mais les autobus n’ont pas tous une porte arrière et les employeurs n’ont pas tous été aussi proactifs.

Nous demandons à Ottawa de forcer les compagnies d’autobus à mettre en œuvre des plans pour mieux protéger leurs chauffeurs.

Lignes directrices de santé publique propres à l’industrie des transports

À ce jour, aucune ligne directrice fédérale n’a été publiée sur la façon de protéger les travailleurs des transports contre le COVID-19. Omettre de protéger les travailleurs des transports provoquerait un effet domino et ultimement, l’effondrement du système économique et social. Cela doit être évité à tout prix.

Notre réseau de transport repose sur un nombre relativement restreint de travailleurs spécialisés qui ne peuvent pas être rapidement remplacés en cas de perte en raison de décès, maladie, isolement ou mise en quarantaine. Sans eux, il n’y aurait personne pour fournir du matériel aux infrastructures essentielles et pourvoir les produits nécessaires aux citoyens.

Ottawa publie déjà des lignes directrices sur la meilleure façon de protéger les travailleurs de la santé contre les infections. Nous vous demandons la même chose pour les travailleurs des transports.

Notre syndicat est prêt à apporter son expertise sur toutes ces questions et demande à être consulté avant toute décision concernant la pandémie COVID-19 et le secteur des transports.

Sincèrement,

Le président de Teamsters Canada
François Laporte

Voir le document original ICI