Nous apprenions en début de semaine que le gouvernement de François Legault allait mettre fin à l’aide de 28 $ par jour que recevaient les nouveaux arrivants inscrits à des cours de francisation à temps partiel, travaillant pour des entreprises de 100 employés et plus. Cette aide s’adressait non seulement aux personnes immigrantes récemment arrivées, mais aussi à celles qui n’avaient pas encore eu l’opportunité d’apprendre le français, même si elles avaient immigré depuis quelque temps.
Le gouvernement justifie sa décision en expliquant que cette aide avait été mise de l’avant pour inciter les gens à s’inscrire à des cours de la sorte, mais qu’elle n’était plus nécessaire puisque la demande a explosé. À la place, les sommes dégagées par la cessation de cette aide vont permettre d’engager plus de ressources pour répondre à cette nouvelle demande.
Or, il y a plusieurs problèmes dans cette logique gouvernementale tordue.
D’entrée de jeu, spécifions que même si tous les syndicats représentent de nouveaux arrivants, la Section locale 106 du Syndicat des Teamsters est particulièrement sensible à leur réalité. Nous représentons, entre autres, les ouvriers et ouvrières de l’usine de vêtements Peerless, où des personnes issues de 30 nationalités s’y côtoient. Depuis des lustres, nous luttons pour l’amélioration des cours de français, essentiels à l’intégration de ces personnes, et l’histoire de notre vice-président et agent syndical responsable de ce groupe, Mario Ayala, a même été reprise à l’écran ( Langue à l’ouvrage – Migrer vers le français au travail ).
Nous souhaitons tous que les personnes immigrantes trouvent leur place dans la société québécoise, et nous sommes également d’avis que cette intégration passe par l’apprentissage du français et son utilisation au quotidien. Toutefois, ce processus doit être fait le plus humainement possible. Déjà qu’en réduisant le temps alloué pour cet apprentissage, en envoyant des communications et documents officiels uniquement en français après 6 mois, le gouvernement Legault vient mettre une pression supplémentaire importante sur les personnes immigrantes, qui ont peu de temps pour apprendre une nouvelle langue complexe tout en débutant un nouveau travail et une nouvelle vie, cette décision vient maintenant ajouter une pression économique supplémentaire!
Ne nous leurrons pas. En enlevant l’aide de 28 $ par jour, le fardeau économique retombe maintenant sur les entreprises ou les individus. Ce montant, non négligeable, pourrait se traduire soit par une réduction des salaires ou une dégradation des conditions de travail si assumé par l’employeur, ou par une baisse du niveau de vie, déjà précaire, si assumé par les individus.
Nous reconnaissons qu’il y a un problème d’accessibilité à ces cours et que plus d’enseignants sont nécessaires, mais si l’intégration des personnes immigrantes était vraiment une priorité du gouvernement Legault, il investirait les sommes nécessaires sans augmenter la pression sur des gens qui sont déjà parmi les plus vulnérables de notre société.
Les personnes immigrantes contribuent à la richesse et à la diversité de notre société québécoise. Ce fut démontré mainte fois, mais répétons-le : leur intégration est bénéfique et chaque dollar investi de cette manière bénéficie à tout le Québec.
Cette décision du gouvernement démontre en soi un manque de vision, un manque de sérieux, ou un manque réel de volonté d’intégration, bien qu’en vérité, il s’agisse probablement d’un mélange des trois.
Nous demandons au gouvernement Legault de revenir sur cette décision, et de travailler avec le milieu communautaire afin de mettre sur pied une véritable stratégie d’intégration pour les nouveaux arrivants.