Alors que le printemps laisse tranquillement place à l’été, il semble que le président Donald Trump soit enfin en train de freiner sa croisade tarifaire, bien que très lentement. Il a récemment annoncé un accord commercial avec le Royaume-Uni et réduit considérablement les tensions commerciales avec la Chine.
On ne sait pas encore exactement quand ce sera au tour du Canada, mais il semble que nos deux gouvernements négocient activement en coulisses. Selon moi, ces discussions représentent une occasion parfaite pour penser différemment, en s’appuyant sur les réussites passées pour trouver un chemin plus efficace pour l’avenir.
Les accords commerciaux globaux et exhaustifs sont relativement récents. Avant les années 1980, les négociations commerciales se faisaient généralement secteur par secteur, selon le principe de réciprocité. L’objectif était alors de réduire les tarifs et barrières commerciales, sans nécessairement les éliminer complètement.
Cette approche par étapes permettait aux gouvernements d’adapter précisément les ententes aux besoins spécifiques de chaque industrie. Et si les circonstances changeaient, il était bien plus simple de réviser un accord sectoriel plutôt que de renégocier tout un cadre commercial.
Soyons clairs : le modèle sectoriel et réciproque n’est pas une solution miracle. Dans certains cas, regrouper des secteurs sous un seul grand cadre peut être bénéfique pour l’économie. Mais ce n’est pas toujours vrai. Alors que l’ordre commercial mondial se transforme, notamment avec l’administration Trump qui signale un certain retrait de la mondialisation, le Canada doit être prêt à défendre ses travailleurs et travailleuses avec des solutions créatives et pragmatiques.
Des secteurs clés doivent être protégés
L’économie canadienne est fondée sur une grande diversité. Ce qui fonctionne pour l’industrie automobile ne convient pas nécessairement à l’agriculture, et ce qui aide le secteur technologique pourrait nuire à l’industrie manufacturière traditionnelle. Forcer tous les secteurs dans un seul cadre général conduit souvent à des compromis qui ne protègent adéquatement personne.
Prenons la gestion de l’offre. Depuis longtemps, le Canada défend ce système pour protéger ses producteurs et productrices de lait, de volaille et d’œufs. Pourtant, chaque fois qu’un nouvel accord commercial mondial est signé, la pression s’intensifie pour affaiblir ou abandonner ces protections. Une approche par secteur permettrait de protéger les industries sensibles, comme l’agriculture, sans devoir les sacrifier au profit d’autres gains ailleurs.
L’aérospatial et un autre bel exemple. Les travailleurs et travailleuses qui construisent des avions et leurs composantes au Canada font face à une concurrence acharnée de pays qui subventionnent massivement leurs entreprises nationales. En intégrant l’aérospatiale dans un grand accord global, on perd l’occasion de riposter efficacement et précisément à ces pratiques injustes.
Il y a aussi le transport et la logistique. Les travailleurs et travailleuses de cette industrie, largement représentée par les Teamsters, jouent un rôle vital dans l’économie canadienne, mais leurs intérêts sont rarement placés au cœur des grandes négociations commerciales. L’ALENA originale avait d’ailleurs accéléré la déréglementation du secteur du camionnage, entraînant une détérioration des conditions de travail et un ralentissement de la croissance salariale.
Revenir à ce modèle ne signifie pas un retour en arrière. Il s’agit plutôt de faire en sorte que le commerce profite aux gens, pas seulement aux profits. C’est s’assurer que les travailleurs et travailleuses, les communautés et les secteurs stratégiques du Canada passent en premier.
Par ailleurs, nous reconnaissons aussi que le commerce seul ne suffit pas. Des mesures complémentaires comme une meilleure protection des droits du travail, des mécanismes robustes d’application et des investissements proactifs dans la formation de la main-d’œuvre sont indispensables.
Et alors que le Canada poursuit ses efforts pour améliorer le commerce interprovincial, nous devons insister sur des échanges internes fondés sur les plus hautes normes, en cherchant à élever tout le monde plutôt qu’à niveler par le bas.
N’est-il pas temps de penser clairement, de négocier intelligemment, et de remettre les travailleurs et travailleuses au cœur de nos stratégies commerciales ?